A bicyclette Le modèle de management situationnel de Ken Blanchard est des plus riches d’enseignements lorsqu’il s’agit d’accompagner quelqu’un vers plus de compétence et d’autonomie. Il peut cependant parfois soulever quelques incompréhensions du point de vue du manager, ou de manière générale de celui qui a une compétence à transmettre à un tiers. Précisons au préalable quelques définitions pour la suite de cet article sur le management situationnel :
- Par motivation, on décrira les raisons pour lesquelles une personne agit. Cela suppose donc qu’il y ait effectivement une action, et non seulement le désir de l’entreprendre. Si pour quelque raison que ce soit (manque de confiance en elle, timidité ou peur de l’échec par exemple), la personne n’agit pas, on parlera ici d’une motivation faible
- Par compétence, on désignera la capacité d’une personne à poser des actes efficaces face à une situation donnée. Elle ne résulte donc pas seulement des connaissances et des savoirs-faires de cette personne, mais également de facteur comme sa familiarité avec le terrain ou l’environnement et de tout autre facteur pouvant influencer l’efficience de ses décisions et actions.
Ces précautions sémantiques étant prises, revenons-en au modèle du management situationnel.
Pour mémoire, ce modèle propose de diagnostiquer le niveau d’autonomie d’une personne dans une situation donnée en s’appuyant sur l’observation de deux paramètres : le niveau de motivation de la personne en question face à sa situation (haut ou bas) et son niveau de compétence (haut ou bas également). On obtient ainsi quatre niveaux d’autonomie possibles, à savoir dans l’ordre : le débutant enthousiaste (motivation forte, compétence faible), l’apprenant (motivation faible, compétence faible), le capable mais prudent (motivation faible, compétence forte) et l’expert autonome (motivation forte et compétence forte).
A chacun de ces niveaux d’autonomie correspond alors, selon ce modèle, un style de management requis pour permettre à la personne d’une part d’être opérationnelle face à sa situation et d’autre part de croître en autonomie pour accéder au niveau d’autonomie supérieure (ou de s’y maintenir, dans le cas d’un expert autonome). La première transition décrite par le modèle du management situationnel peut dérouter : afin de devenir apte à apprendre, la personne accompagnée devra dans un premier temps … perdre sa motivation. Ce n’est qu’à cette condition qu’il pourra quitter son statut de « débutant enthousiaste » pour devenir un « apprenant ».
La troisième phase également peut dérouter le manager dans sa mise en pratique : la personne accompagnée dispose visiblement des compétences requises pour mener sa tâche à bien, mais elle continuera malgré tout de solliciter son manager pour l’exécution de cette tâche. Agacement et impatience menace alors ce dernier, d’autant que de ne pas répondre à cette sollicitation peut effectivement entraîner l’échec de l’accompagné.
Management situationnel et bicyclette
Pour éclairer ces incompréhensions potentielles, l’exemple d’application le plus parlant me semble être celui de l’apprentissage de la bicyclette à un enfant. Attention, il ne s’agit pas de vous inciter à infantiliser vos collaborateurs, simplement de mettre en exergue des comportements d’apprentissage très communs, et qui en bonne partie n’ont pas forcément beaucoup évolué depuis l’enfance. Comment cela commence-t-il en général ? Par une annonce : « Dimanche, je vais t’apprendre à faire de la bicyclette ».
Et la réponse ? « Oh oui, chic chic, tu vas voir, je vais être super fort ! Et quand je saurai en faire, je pourrai faire ceci et cela ! » Rendez-vous est pris, donc, pour le dimanche, où vous menez votre apprenti dans un lieu sécurisé propre à accueillir ses premiers coups de pédale.
Une fois sur place, vous avez beau vous escrimer à lui expliquer comment il devra procéder, rien à faire, son niveau d’écoute est inversement proportionnel à son niveau d’enthousiasme. Il faut se rendre à l’évidence : non seulement il ne sait pas faire de bicyclette, mais il n’en a pas conscience et sous-estime grandement la difficulté de l’exercice.
De guerre lasse, vous le laissez essayer, muni du peu d’instructions qui ont réussi à filtrer à travers la carapace de son enthousiasme débordant, et en sécurisant suffisamment la situation pour prévenir de trop gros dégâts. Il se lance, donc, et l’inévitable se produit : boum, il chute. Et soudain, par le biais de cette expérience, il engrange deux leçons essentielles : la première est qu’il ne sait pas encore faire de la bicyclette, en fin de compte, et la deuxième est que de chuter fait mal.
Son enthousiasme refroidit et sa motivation tombe au plus bas, le voilà devenu apte à apprendre. S’en suit la période la plus dense en terme de développement de compétence : nourri et de vos directives et de votre soutien, il progresse, jusqu’à acquérir ce qui vous paraît, à juste titre, un niveau de compétence suffisant pour rouler tout seul. Mais que vous dit-il alors ? « Ne me lâche surtout pas, sinon je tombe ! » Votre apprenant a pris de la graine, le voici devenu capable … mais prudent.
Excessivement prudent, peut-être, de votre point de vue. Excessivement prudent, car vous le voyez bien qu’il sait s’y prendre à présent. Excessivement prudent, car vous vous lassez de passer votre temps à courir à ses côtés, la main sur le porte-bagage, alors que vous auriez bien d’autres usages de votre temps et de votre énergie. Mais voilà, comme il vous l’a dit, si vous retirez votre main et qu’il s’en aperçoit, il chute. Cette phase demande patience et compréhension.
Ce n’est à l’évidence plus de vos directives dont il a besoin, simplement de votre présence, de votre soutien. Et enfin, au terme de cette phase éprouvante pour vos nerfs, le voilà qui accède au statut d’expert autonome : il sait faire de la bicyclette, en a conscience et en est fier. Et que vous dit-il pour vous remercier de tous vos efforts et de vos trésors de patience ? « Oh, lâche-moi, je n’ai pas besoin de toi, pour qui me prends-tu ? » …A ce signal, vous saurez que vous avez accompli votre mission avec succès.
Michel Ottmann
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